Société des Amis
de Louis Aragon et Elsa Triolet
Portrait
de Louis Aragon
Louis Aragon naît à Paris le 3 octobre 1897. Enfant naturel, il apprend officiellement, en 1917, lorsqu’il part à la guerre en tant que médecin auxiliaire, que l’homme politique Louis Andrieux est son père.
A l’hôpital du Val de Grâce, il noue une relation d’amitié avec André Breton. Dès 1918, il publie ses premiers poèmes et rencontre Paul Éluard, Philippe Soupault, Tristan Tzara... Il collabore à la revue Littérature. En octobre 1924, il publie Une Vague de rêves que l’on peut considérer comme un premier Manifeste du Surréalisme dont il est avec André Breton et Philippe Soupault le fondateur.
Le 6 janvier 1927, il adhère au Parti communiste français. A cette époque, il mène une vie sentimentale agitée. Sa liaison passionnée avec Nancy Cunard lui inspirera de nombreux poèmes mais s’achèvera de façon dramatique par une tentative de suicide, à Venise, en septembre 1928. Déjà cette première période de l’œuvre d’Aragon est riche en créations littéraires (Le Paysan de Paris, Traité du style, La Défense de l’infini, ...).
Le 5 novembre 1928, Aragon rencontre Maïakovski à La Coupole, haut lieu de la vie artistique de Montparnasse ; le lendemain, au même endroit, Roland Tual lui présente Elsa Triolet, amie du poète soviétique. Aragon fera de leur amour un des grands mythes littéraires du XXe siècle. Elsa lui ouvre les portes d’un continent culturel nouveau, celui de la littérature soviétique. C’est aussi l’époque de la rupture avec les membres du groupe surréaliste.
Écrivain, journaliste, directeur du quotidien Ce soir (avec Jean-Richard Bloch), en 1937, il s’engage dans les combats contre le fascisme qui menace l’Europe. À nouveau mobilisé en 1939-1940, il participe avec éclat à la défense de son pays.
Après l’Armistice de juin 40, il refuse, avec Elsa, les propositions qui leur sont faites de se réfugier aux États-Unis et décident de rester en France. Installé en ”zone sud“, Aragon prend une part active à la Résistance. Il s’attache au regroupement des intellectuels antifascistes dans la clandestinité, à la publication et à l’édition d’œuvres et de journaux clandestins (Les Lettres françaises, Les Étoiles). C’est la période de la ”poésie de la Résistance“ caractérisée par l’exaltation du sentiment national en recourant aux sources de la poésie française du Moyen-Âge. Le retentissement de son œuvre clandestine est considérable et lui donne une grande notoriété.
Toute sa vie, il ne cessera de mener de front son œuvre de poète, de romancier, de journaliste. À la Libération, il préside le Comité National des Écrivains, il reprend la direction de Ce soir puis celle de l’hebdomadaire Les Lettres françaises. Il donne des articles à L’Humanité et participe au débat sur la politique culturelle de son parti. Dans le difficile contexte de la guerre froide, il est l’écrivain de tous les combats pour la liberté d’expression, partie prenante des questions qui agitent le monde, découvreur de jeunes talents, car témoin attentif de son temps.
Au seuil de la vieillesse, son œuvre prend une orientation nouvelle : il mêle poésie et roman, abolit les frontières entre fiction et autobiographie... Il questionne les codes de l’écriture romanesque et poétique.
Il meurt à Paris le 24 décembre 1982.
Portrait
d'Elsa Triolet
Elsa Triolet est née à Moscou le 12 septembre 1896, dans une famille de l’intelligentsia juive russe. Elle est mêlée très tôt à la vie intellectuelle, avec pour amis d’enfance, Roman Jakobson, Victor Chklovski. Très jeune, elle rencontre Pasternak, Ossip Brik, Maïakovski, Maxime Gorki...
Peu passionnée par les événements politiques de la Russie, elle mène des études d’architecture et rencontre André Triolet qu’elle épouse et suit dans son poste diplomatique à Tahiti. En 1921, elle se sépare d’André Triolet et revient en Europe. Commence alors pour Elsa une vie d’errance à Berlin, Londres et enfin Paris.
À Paris, elle fréquente les ”Montparnos“, lit les surréalistes. Elle a pour amis, Marcel Duchamp, Jeanne Léger, Man Ray, Francis Picabia. Le 6 novembre elle rencontre, à La Coupole, Louis Aragon qu’elle souhaitait connaître après avoir lu Le Paysan de Paris. A cette époque, elle écrit et publie en russe. Dès 1929, elle s’installe avec Louis Aragon. Ils ne se quitteront plus.
Elle choisit d’écrire en français en cachette d’Aragon, notamment des articles pour se familiariser avec la langue française et en 1938, elle achève son premier roman en français Bonsoir Thérèse dont la lecture bouleverse Aragon.
Puis vient la période difficile de la guerre où la vie d’Elsa est très liée à celle d’Aragon. Ils se distinguent par une action courageuse dans la Résistance, notamment auprès des intellectuels. Son œuvre littéraire ne s’arrête pas pour autant et après la guerre, elle poursuit son action au sein du Comité national des Écrivains dont elle assure le secrétariat, et tient des rubriques aux Lettres françaises.
Son talent de romancière est reconnu : elle est la première femme à recevoir le prix Goncourt, obtenu en 1945 pour Le Premier accroc coûte deux cents francs.
À partir de cette période, elle développe son activité d’écrivain, de traducteur, de défenseur de la liberté d’expression. Toujours aux côtés d’Aragon, elle garde sa forte personnalité et son originalité littéraire. Dès la fin des années 50, elle souffre d’artérite, maladie qui l’emportera le 16 juin 1970. Elle consacre les dernières années de sa vie à l’écriture et à l’entreprise commune des Œuvres romanesques croisées.
Elle repose avec Louis Aragon dans le jardin du Moulin de Saint-Arnoult-en-Yvelines. « Quand côte à côte nous serons enfin des gisants, l’alliance de nos livres nous unira pour le meilleur et pour le pire dans cet avenir qui était notre rêve et notre souci majeur, à toi et à moi. La mort aidant, on aurait peut-être essayé et réussi à nous séparer plus sûrement que la guerre de notre vivant : les morts sont sans défense. Alors nos livres croisés viendront noir sur blanc, la main dans la main, s’opposer à ce qu’on nous arrache l’un à l’autre. » (Introduction aux Œuvres romanesques croisées, 1964).